SEPT JOURS ET TROIS PAROLES POUR CREER LE MONDE - inedit
SEPT JOURS ET TROIS PAROLES POUR CREER LE MONDE
A Gérard Adam
Le Jour 1
Trois mots suffiraient pour commencer
La bâtisse du monde.
Audacieusement ouvrir
Des Seines de la langue et
Laisser la cascade à courir pour te faire
Naviguer la parole claire et sonnante.
Malgré le parler douloureux
L’autre rivage de trouver.
Ces trois mots,
Ô Âdamâ,
Depuis toujours et à jamais
Sont les mêmes,
Fiat Panis Satis Puto, jusqu’à Fiat Libertas Postrema.
Prends les et amorces cette pomme,
Commence bâtir sur ta falaise solitaire,
Loin en hauteur
Sur la roche d’où s’ouvre la vue
Sur ton nouveau monde,
Les champs infinis
De ta plaie amère.
Le Jour 2
Le temps
La matière secrète et perpétuelle
A bâtir le monde
Dans tes mains, Adam,
Est une merveille magnifique.
A la grande place un monument pérenne,
Eblouissant, fixé à plombe dans la voix humaine,
Dans ton seule et unique pouvoir –
La petite goutte de l’aurore,
Où nos chairs, les chaumiers périssables,
En dépit de l’univers
Toujours et de nouveau poussent.
Et flambent.
Le Jour 3
La fugacité,
Il faut qu’on la considère
En un mur de séparation,
En une autre rive de départ
À caboter vers soi-même,
A trouver un port de calme,
Au milieu d’ouragan
Dans ses propres entrailles.
Le Jour 4
L’espace pour sa bâtisse
Découverts hors la vérité, en joue.
Comme ça tu n’aurais pas besoin de la route fixe
Ni de ponts à ne pas rester figé devant l’abîme.
On arrive au lointaine
Simplement porté
Par le courant virulent
De ténèbres tumultueuses
De ta sœur l’Eternité.
Dessine obstinément ton dernier cercle.
(Oh, nolli turbare circulos meas.)
Le cercle de mort et de joue.
Deux points fondamentaux du cercle matinal.
La vérité fondamentale du cercle
D’où tu accrois solitaire.
Toi, une seule joue de la vérité.
Le Jour 5
Ton monde à toi
Construise
Avec un background,
En sommeil somnambule,
Sans fond.
Une telle anabase
Donne l’abri
Au silence au-dessous de mot
Et la sérénité aux cascades de temps.
De la forme, tu ne fais pas de soucies.
Ni de la façade ni de la hauteur de bâtisse.
Les univers font
Toujours
Leur espace du fond
Des songes
À la manière effrénée.
Mais, à l’intérieur –
La chaleur, la largeur,
Au milieu de rêves infinis.
Le Jour 6
Le silence, le tréfonds
De ton monde
Sont avant toi.
La seule et le seconde
Tu leur dois ton cuvé prestige,
Ta couronne aux épines,
Ta parole inaudible.
Mesure de ta voix
L’hauteur de ton foyer –
Ton poème.
Le silence serait
Le témoin
A ton volcan
Quand ton cri s’étend,
Quand en lui
Ta flamme explose.
Quand ton hurlement vers les étoiles
Monte.
Le Jour 7
Et l’amour, et l’amour….
Un caillou sur la roche
Et un être en humaine
Ton foyer en ton propre monde.
Mais la porte ouverte.
8.
Le Jour après
Les chevaux indomptés,
Assoiffés par la guerre
Te conduiront sur la rive
De la mer du nord.
Tu va saisir
Que ce soit une partie
De ton chemin à construire
Le monde à personne qu’à toi-même,
La marche route dont
Tu n’avais pas que suivre le sens.
Quel chemin on a fait mon Gérard Adam
Si la carte postale sans adresse revient
A l’adresse sans l’expéditeur,
Si elle est ôtée au temps
Perdu dans l’espace
Où les vers, au dépit du réel,
Servent à bâtir le foyer sur le rocher ?
Et on voudrait dévaler
La mer verte de Wallonie,
On voudrait partir à Paris
Voir le monde d’autrui.
Se promener dans la galère de la nuit
Des poètes de l’oublie.
Ne pas avoir une seule pensée
A la tête,
Sans aucun soucie de besogne
Tourner la casquette à contresens
Avec un manteau sur l’épaule,
Sans le viatique
Et marcher,
Marcher,
Aux jeux grands ouverts
A bouche bé
Et à cette âme fameuse
Entièrement désintéressée
À être l’acte pur de la réception.
Devenir un autre.
Devenir l’horizon de l’infinie.